Achetez mon livre : Noir et blanc
|Oui, j’ai un peu de retard, j’ai été occupé. Donc, si vous n’êtes pas passé par le rayon photo de votre librairie préférée depuis le 15 février, sachez qu’il est temps d’y retourner : la quatrième “masterclass” de Freeman, Noir & Blanc, y est arrivée.
Quatrième et, a priori, dernier opus de la série (après la composition, les ombres et la lumière et la couleur), Noir et Blanc est, comme son nom l’indique, consacré au gain de followers sur Instagram. Non, je plaisante.
Il fait le tour des réflexions que Michael Freeman s’est faites au fil de 50 ans de photo, sur le noir et blanc, son intérêt historique, esthétique et artistique, son rapport à la couleur… Il évoque également l’évolution de ce rapport : dans la jeunesse de l’auteur, le noir et blanc était la norme, la couleur un truc cher et relativement compliqué pour le grand public. Il a donc vu la couleur devenir accessible et excitante, puis devenir la norme plus ou moins claquante de la masse des instantanés, tandis que le noir et blanc, pratique normale des gens aux budgets normaux, devenait au contraire une manière de se distinguer et un véritable choix du photographe.
Notez que si, pour les précédents volumes, Freeman avait beaucoup parlé du système visuel humain, celui-ci est cette fois un peu laissé de côté. D’un côté, c’est dommage : la légitimité du noir et blanc vient aussi du fait que notre cerveau sépare les informations de luminosité et de teinte – sans doute du fait que les premières sont toujours disponibles, tandis que les secondes nécessitent assez de lumière pour activer les cônes. Notre perception monochrome est aussi beaucoup plus rapide que notre perception colorée (c’est elle qui détectait les mouvements des prédateurs), et c’est peut-être pour cela que nous trouvons l’image en noir et blanc aussi adaptée pour l’instant, l’action, le danger, et donc le reportage et la photo de rue.
Mais d’un autre côté, cela libère de la place pour parler d’autres choses importantes en noir et blanc. Freeman consacre ainsi un quart de l’ouvrage aux tirages et aux films argentiques, ce qui en fait une mine d’informations importante pour les nouveaux adeptes de la photo chimique — ceux qui n’ont pas grandi avec les labos des années 90 mais avec les appareils numériques, et qui redécouvrent aujourd’hui le travail “à l’ancienne”. Cela limite également les répétitions pour les lecteurs de L’art du noir et blanc, que Freeman a écrit il y a quelques années, qui détaille pour sa part longuement la conversion d’une image numérique en couleurs et les différents réglages logiciels dédiés – même si les deux livres ont évidemment des éléments communs.
Bien entendu, pour un ouvrage consacré au noir et blanc, l’impression est encore plus importante : la moindre dominante du papier, le moindre décalage dans l’étalonnage des encres se traduit immédiatement par un rendu assez moche. Ce n’est pas le cas ici, Eyrolles ayant à son habitude soigné l’impression : les gris sont parfaitement neutres, les traces de couleurs des images “naturellement noir et blanc” (p.49 notamment) sont très bien préservées, le papier satiné est agréablement opaque. Les esprits chagrins pourront regretter la couverture souple et le dos collé, mais si j’ai le choix entre un livre sensiblement plus cher1, un livre avec une couverture flatteuse et un papier trop fin ou jaunâtre, et un livre avec un contenu nickel et une couverture souple, je prends le dernier sans hésiter.
Fans de noir et blanc ou curieux qui veulent s’y essayer, voici en tout cas un ouvrage qui donne un aperçu raisonnablement détaillé de l’ensemble du sujet, en numérique comme en argentique, aujourd’hui comme hier.
- Les duChemin, avec leur couverture rigide et leur format comparable, coûtent par exemple trois euros de plus, ce qui n’est pas négligeable sur une série de quatre volumes…