Achetez mon livre : L’âme d’une image

Ça fai­sait un petit moment que vous aviez pas eu de billet-pro­mo. Mais c’est juste que l’u­ni­vers de l’é­di­tion fonc­tionne par vagues et, en sep­tembre, publie en un mois le tra­vail de huit. Pour ouvrir la ren­trée1, voi­ci donc L’âme d’une image, de David duChemin.

DuChe­min, c’est un peu un pho­to­re­por­ter à l’an­cienne, qui vadrouille beau­coup, ren­contre énor­mé­ment de gens et réflé­chit tout autant. Il a publié une série d’ou­vrages sur la pho­to­gra­phie, non sous l’angle tech­nique comme un Free­man, mais plu­tôt sous l’angle philosophique.

Celui-ci ne déroge pas à la règle : sous pré­texte de cher­cher ce qui fait l’âme d’une pho­to, duChe­min par­tage une suite de réflexions et de médi­ta­tions sur la pho­to­gra­phie. Ce qui pousse le pho­to­graphe, l’im­por­tance de faire preuve d’ou­ver­ture, de curio­si­té et même d’a­mour envers ses sujets, mais aus­si la néces­si­té de com­prendre qu’un cli­ché est tou­jours une inter­pré­ta­tion et que l’on ne contrôle pas tout, et sur­tout la ques­tion lan­ci­nante de la qua­li­té et de l’a­mé­lio­ra­tion — en tant que pho­to­graphe et éven­tuel­le­ment en tant qu’être humain.

Or, si beau­coup d’au­teurs expliquent com­ment ils font les choses, par­lant maté­riel ou tech­nique, peu se penchent sur la pho­to­gra­phie elle-même, de ses moti­va­tions à ses satis­fac­tions et ses frus­tra­tions. Le résul­tat est un ouvrage sus­cep­tible de nour­rir des réflexions extrê­me­ment variées, même pour quel­qu’un qui aurait une pra­tique pho­to­gra­phique très dif­fé­rente de celle de duChe­min2. Ce livre peut par­fois être un peu exi­geant, mais il est riche et passionnant.

À tra­duire, ce fut un plai­sir érein­tant. Plai­sir, parce que je venais de faire un bou­quin com­plet de textes très fac­tuels, sou­vent d’une demi-page, où le prin­ci­pal défi était de tout faire tenir dans le volume impar­ti. Pas­ser à un vrai récit, long et déve­lop­pé, où il n’est géné­ra­le­ment pas gênant que le para­graphe fran­çais soit un peu plus volu­mi­neux, m’a offert une vraie res­pi­ra­tion. Plai­sir aus­si parce que l’on absorbe un texte de manière très dif­fé­rente quand on le tra­duit ou quand on le lit, et que tra­duire une série de réflexions phi­lo­so­phiques m’a offert une occa­sion de vrai­ment plon­ger dans un bou­quin que je n’au­rais peut-être que sur­vo­lé en temps normal.

Érein­tant, parce que duChe­min est un vrai lit­té­raire, au lan­gage pré­cis. S’il est agréable de pou­voir pro­duire un vrai texte, sans se pous­ser à res­ter simple ni fuir les tour­nures soi­gnées, ça a un corol­laire : impos­sible de se conten­ter d’ap­proxi­ma­tions, de tra­duire le fond en lais­sant flot­ter la forme ! Il m’est arri­vé plus d’une fois de revoir une phrase quelques heures plus tard et de me dire : “non, ça, c’est ce que je dirais si je vou­lais dire ça, mais ça ne colle pas avec son style à lui”. Ou de voir un petit double-sens et de reve­nir trois, quatre fois sur la même phrase, tes­tant dif­fé­rentes variantes jus­qu’à gar­der celle qui résis­te­rait le mieux à mon auto-critique.

Pour finir, j’ai eu une petite sur­prise en rece­vant mes exem­plaires : si Eyrolles a pour habi­tude de soi­gner l’im­pres­sion, ils se sont sur­pas­sés sur ce coup. Une belle reliure rigide à la neu­tra­li­té irré­pro­chable, un papier sati­né limi­tant bien les reflets tout en offrant un contraste éle­vé et une belle res­ti­tu­tion des tons inter­mé­diaires — sur les pages où il y a des pho­tos… Le pavé est un poil lourd en main, mais c’est un très bel objet, agréable à mani­pu­ler et qui pren­dra aisé­ment place sur les rayons d’hon­neur de votre bibliothèque.

  1. Pour l’a­nec­dote, il a dou­blé sur le fil un autre ouvrage, que j’ai tra­duit avant mais dont je ne vous par­le­rai que dans quelques semaines.
  2. Au hasard, un type qui ferait sur­tout de la pho­to aéro et qui consi­dé­re­rait un 150 mm comme un grand-angle.