HandeVision : cinq cailloux à f/2,4

24 mm, 35 mm, 50 mm, 75 mm et 90 mm : c’est toute une gamme d’ob­jec­tifs que le Japo­nais Han­de­Vi­sion a annon­cée. Bap­ti­sée Ibe­rit, on n’y trouve que du clas­sique, mais des com­pro­mis bien plus acces­sibles que son fer de lance, l’I­be­lux 40 mm f/0,85.

Celui-ci avait mar­qué par son ouver­ture, supé­rieure au célèbre Noc­ti­lux. Coû­tant 1 800 €, pesant plus d’un kilo, ce monstre était pour­tant réser­vé aux cap­teurs APS et les retours ont été plu­tôt mitigés.

Avec les Ibe­rit, Han­de­Vi­sion revient à des solu­tions plus éprou­vées. Ces objec­tifs se contentent de f/2,4, ce qui per­met des for­mules optiques plus simples : les plus com­plexes sont a prio­ri (la for­mule du 24 mm n’a pas été pré­ci­sée) les 35 mm et 50 mm, avec six len­tilles en six groupes. En com­pa­rai­son, l’Ibe­lux, en fait un double-Gauss équi­pé d’un com­pres­seur d’i­mage (comme le célèbre Zeiss 50 mm f/0,7 de Bar­ry Lyn­don), comp­tait dix len­tilles en huit groupes.

Iberit 50 mm f/2,4. document HandeVision
Ibe­rit 50 mm f/2,4. docu­ment HandeVision

Cette sim­pli­ci­té a plein d’a­van­tages. D’a­bord, les Ibe­rit sont com­pa­tibles 24x36 mm, ce qui per­met de les uti­li­ser sur un Lei­ca M ou sur un Sony α7. Ensuite, ils pèsent moins de 400 g. Enfin, ils coûtent dans les 600 € maximum.

Cela n’empêche qu’ils res­tent rela­ti­ve­ment encom­brants : le plus com­pact, le 35 mm, fait déjà 45 mm de lon­gueur en ver­sion Sony. Cer­tains élé­ments tech­niques res­tent un peu frustres, comme le dia­phragme à six lamelles (seul le 90 mm, focale à por­trait oblige, y échappe avec ses dix lamelles) et la dis­tance de mise au point un peu longue (35 cm pour le 35 mm, 60 à 70 cm pour les autres). Bref, sur le papier, cette gamme est jolie, sur­tout avec ce lan­ce­ment qua­si-simul­ta­né (début 2016 pour le 35 mm, le 50 mm et le 70 mm, dans l’an­née pour les autres), mais les objec­tifs qui la com­posent n’ont rien de véri­ta­ble­ment remarquable.

Intérêt limité ?

Le point de vue de l’u­ti­li­sa­teur varie­ra sans doute gran­de­ment selon la mon­ture. Pour un Lei­caïste, un objec­tif à 600 € est un cadeau à qui l’on par­don­ne­ra beau­coup. Pour un Sonyïste, c’est déjà un tarif éle­vé, sur­tout pour des objec­tifs entiè­re­ment manuels : le Zeiss 35 mm f/2,8, com­pact, auto­fo­cus et pas mau­vais, est dans la même plage tarifaire.

Gamme Iberit : lancement début 2016 (35, 50 et 75 mm), courant 2016 (24 et 90 mm). document HandeVision / DC Watch
Gamme Ibe­rit : lan­ce­ment début 2016 (35, 50 et 75 mm), cou­rant 2016 (24 et 90 mm). docu­ment Han­de­Vi­sion / DC Watch

Enfin, ces objec­tifs seront éga­le­ment dis­po­nibles en mon­ture Fuji­film X. C’est peut-être là que leur vie sera la plus com­pli­quée : Fuji­film a une belle gamme de focales fixes aux rap­ports qualité/prix allé­chants, opti­mi­sées pour leur sys­tème et donc plus com­pactes (ou plus lumi­neuses à volume égal). On ima­gine dif­fi­ci­le­ment quel argu­ment pour­rait, par exemple, pous­ser à ache­ter l’I­be­rit 35 mm f/2,4 quand le Fuji 35 mm f/1,4 lui met 1,5 EV dans la vue, dis­pose d’un auto­fo­cus, est bien construit (avec une bague de dia­phragme pour les ama­teurs) et pro­pose une qua­li­té optique recon­nue, le tout pour le même prix. L’I­be­rit 50 mm est éga­le­ment assez proche du champ du Fuji­film 60 mm de même ouver­ture, mais celui-ci fait en plus macro et pro­pose un piqué ahu­ris­sant, une fois encore à tarif comparable.

Fina­le­ment, la jolie gamme Ibe­rit risque d’a­voir du mal à trou­ver sa place chez les uti­li­sa­teurs de Sony et Fuji ; res­tent les Lei­caïstes, mais ceux-ci ont géné­ra­le­ment les moyens et la volon­té de s’of­frir des pas­tilles rouges plu­tôt que des modèles ger­ma­no-nip­pons assem­blés en Chine. Et même pour ceux qui n’ont pas tout à fait le bud­get de leurs core­li­gion­naires, des alter­na­tives popu­laires existent déjà (Cosi­na-Voigtlän­der par exemple) face aux­quelles s’im­po­ser sera difficile.

Der­nier incon­vé­nient : ces objec­tifs seront lan­cés en hiver. Bien, essayez de pro­non­cez “Ibe­rit” avec un rhume… Voi­là, ça sent pas bon.