Achetez mon livre : L’âme du photographe

Par­fois, le rayon “nou­veau­tés” de votre librai­rie favo­rite croise le rayon “best-sel­lers tra­di­tion­nels”. Allez donc véri­fier : avec beau­coup de bol, vous y trou­ve­rez deux ver­sions de L’âme du pho­to­graphe, de David duChe­min, dis­tin­guées par une mise en forme dif­fé­rente de la cou­ver­ture, le nom de l’é­di­teur et sur­tout la men­tion “édi­tion 10e anniversaire”.

Couverture de L'âme du photographe, édition 10e anniversaire

Dix ans après, duChe­min a ain­si repris l’ou­vrage qui l’a fait connaître, pour le retra­vailler. Dans quelle mesure, je ne sau­rais dire : je n’ai pas la pre­mière mou­ture sous la main. J’i­ma­gine que les modi­fi­ca­tions ne doivent pas être négli­geables, puis­qu’Ey­rolles a pré­fé­ré le refaire tra­duire de A à Z plu­tôt que de se baser sur la ver­sion fran­çaise exis­tante (édi­tée à l’é­poque par feu Pear­son). Je lais­se­rai en tout cas à ceux d’entre vous qui connaissent le pre­mier par cœur (j’ai les noms) le soin de voir ce qui a chan­gé, au-delà de la nou­velle introduction.

Par rap­port à L’âme d’une image, écrit et tra­duit l’an pas­sé, L’âme du pho­to­graphe est plus clas­sique. Les cli­chés sont plus pré­sents et ils illus­trent sou­vent le texte. Celui-ci, un peu moins lit­té­raire, un peu plus direct, parle régu­liè­re­ment du com­ment.

Vous trou­ve­rez par exemple des expli­ca­tions sur la tech­nique du filé sur un rick­shaw de Del­hi, l’in­fluence de la pro­fon­deur de champ sur la signi­fi­ca­tion du por­trait d’un motard hima­layen, com­ment construire une nar­ra­tion à tra­vers une séquence d’i­mages d’un monas­tère tibé­tain… L’ou­vrage est ain­si plus pra­tique, acces­sible et, quelque part, grand public, que le der­nier-né, qui part du prin­cipe que vous connais­sez le com­ment et qu’il vous faut réflé­chir au pour­quoi.

Pour autant, L’âme du pho­to­graphe n’est évi­dem­ment pas un livre de conseils pra­tiques pour débu­tants. C’est un duChe­min, avec ses ques­tion­ne­ments qua­si-méta­phy­siques et sa rela­tion intime à ses sujets. Qu’il s’a­gisse de gens, de lieux ou de cultures, il faut certes maî­tri­ser son appa­reil et savoir quel ren­du choi­sir à quel moment, mais il faut avant tout s’in­té­res­ser, être tou­ché, res­pec­ter, prendre le temps de faire connais­sance en explo­rant un peu… et ne pas avoir peur du ridi­cule : faire le clown marche par­tout, et le fou rire est une expres­sion uni­ver­selle qui per­met de relier à coup sûr le modèle et l’observateur.

Et lors­qu’il parle de matos ou de tech­nique, c’est notam­ment pour ten­ter de récon­ci­lier l’ar­tiste et le geek, le pho­to­graphe qui veut immor­ta­li­ser la nature pro­fonde d’un sujet et celui qui vise une expo­si­tion par­faite et la mise au point exac­te­ment là avec un peu de flou ici voi­là c’est bien.

La tra­duc­tion a été plus aisée, peut-être parce que j’a­vais déjà 300 pages de duChe­min dans les doigts, peut-être parce que ce texte est plus acces­sible, peut-être aus­si parce que cette fois, j’a­vais du temps1. Ce fut en tout cas un plai­sir, après trois volumes très tech­niques, de reve­nir à un texte au long cours, plus huma­niste et phi­lo­so­phique par moments.

Le pro­chain, d’ailleurs, sera un peu de la même veine, mais plus suc­cinct et plus orien­té vers la pra­tique. Au cas où je ne l’au­rais pas déjà dit une demi-dou­zaine de fois, la varié­té des pro­jets chez Eyrolles est un vrai régal pour ceux qui tra­vaillent avec eux !

  1. Même si, quand j’ai accep­té ce tra­vail, je ne savais pas qu’on allait me prendre un gros mi-temps à par­tir de mars.