Connaissez-vous le sténopé ?

Le sté­no­pé, c’est l’ob­jec­tif le plus simple qui soit : un trou dans un maté­riau opaque, une chambre noire autour, et un truc pour voir sur la face oppo­sée au trou (feuille de papier, verre dépo­li, film ou cap­teur, les pos­si­bi­li­tés sont larges). L’i­dée a été décrite pour la pre­mière fois par mon­sieur de Vin­ci, Léo­nard, génie de son état, même s’il semble qu’elle ait été uti­li­sée avant d’être expliquée.

En fait, le prin­cipe est tout sim­ple­ment de sup­pri­mer les rayons qui arrivent n’im­porte com­ment pour ne gar­der que ceux qui passent par un point pré­cis. Évi­dem­ment, il n’est pas pos­sible de faire un trou vrai­ment ponc­tuel, mais des dia­mètres de l’ordre du quart de mil­li­mètre sont cou­rants, ce qui nous fait vite des ouver­tures de l’ordre de f/100.

Le sté­no­pé n’a pas de mise au point : les rayons pas­sant tous par un point, la pro­fon­deur de champ est théo­ri­que­ment infinie.

On trouve assez faci­le­ment de la docu­men­ta­tion sur la construc­tion d’un sté­no­pé pour l’ob­ser­va­tion ou la pho­to argen­tique, mais jamais pour le numé­rique. À cela, une rai­son simple : la plu­part du temps, on construit toute la chambre, sans uti­li­ser d’ap­pa­reil pho­to, et il n’est pas évident de trou­ver un cap­teur grand for­mat dans la nature, sans le boî­tier qui va autour.

En prime, la plu­part des appa­reils numé­riques ne veulent pas entendre par­ler d’un déclen­che­ment sans objec­tif. Ils aiment bavar­der avec leur caillou, échan­ger des infor­ma­tions sur la lon­gueur focale, l’ou­ver­ture, la dis­tance de mise au point, tout ça.

Ici, une excep­tion (il y en a peut-être d’autres) : Pentax. Qui, pour res­ter com­pa­tible avec des objec­tifs d’une époque où le tran­sis­tor était à peine inven­té, fait des appa­reils capables de déclen­cher nus sans se poser de ques­tion. Coup de bol, j’ai un K10D (même deux, mon père a été tel­le­ment convain­cu quand il a com­pa­ré à son 300D qu’il s’en est payé un à son tour).


Donc, une feuille d’a­lu­mi­nium, per­cée d’un trou le plus fin pos­sible, mais pas trop quand même (au pre­mier essai, j’a­vais de très beaux motifs de dif­frac­tion, au second, le trou était trop gros, voir ci-des­sus), pla­quée sur la mon­ture — je l’a­vais mise direc­te­ment, c’é­tait juste pour voir si ça marche ; le tirage de la mon­ture K per­met d’es­ti­mer la dis­tance focale à envi­ron 35 mm, il fau­dra inter­ca­ler une chambre noire pour aug­men­ter la dis­tance focale et il ne serait pas pru­dent de la réduire.

Là, on remarque quand même deux choses :

  • La mesure de lumière est com­plè­te­ment archi-faus­sée. Il faut donc tâton­ner, d’EV en EV, jus­qu’à obte­nir une lumi­no­si­té cor­recte — ici, une demi-seconde.
  • Le flou n’est pas dû à un pro­blème de mise au point (il n’y en a pas sur un sté­no­pé), mais à la taille du cercle de confu­sion qui dit clai­re­ment que mon trou était trop gros. D’ailleurs, vous note­rez que le flou sur le volet à droite, à vingt cen­ti­mètres, et celui sur les arbres au milieu, à un kilo­mètre, est sen­si­ble­ment le même.

Voi­là , j’ai remis pour 17–70 sur l’ap­pa­reil, je vous laisse le soin de vous amu­ser à essayer vous-mêmes si vous avez la patience de faire un trou par­fai­te­ment rond de 0,2 mm.